James Murray, analyste senior, et Amadeo Alentorn, responsable des actions systématiques, ont résumé certaines des subtilités de l’investissement « value » et expliqué pourquoi c’est important pour les investisseurs.

L’investissement « value » existe depuis longtemps – au moins aussi longtemps que Security Analysis, le célèbre livre de Benjamin Graham et David Dodd, publié pour la première fois en 1934. La philosophie principale des investisseurs « value » consiste à sélectionner des actions sous-évaluées par rapport à leur valeur intrinsèque. Ce style d’investissement a été critiqué ces dernières années et a été confronté à des performances difficiles. Dans cette note, nous présentons une vue d’ensemble de la mise en œuvre de notre méthodologie d’investissement « value », dans le cadre de notre processus d’investissement, et nous expliquons certaines des décisions importantes que nous prenons dans le cadre de notre approche systématique.

 

L’une des principales convictions de notre équipe est que les rendements factoriels varient dans le temps. Nous pensons que sur un horizon à long terme, les facteurs tendent à générer des rendements supérieurs au risque qu’ils prennent. Toutefois, le chemin est semé d’embûches : les différents facteurs connaissent des périodes de vigueur et de faiblesse. Pour nous protéger contre les hausses de volatilité, nous allouons sur un large éventail de facteurs et ajustons de manière dynamique nos allocations en fonction de l’environnement de marché. 

Rotations récentes de style de gestion

Afin de démontrer le caractère variable dans le temps des rendements factoriels, nous suivons la recherche académique dans la construction des portefeuilles factoriels. Chaque mois, nous divisons l’ensemble de l’univers des actions investissables en cinq portefeuilles équipondérés en fonction de notre évaluation interne de la valeur. Les actions sont ordonnées entre les valeurs les plus chères et les moins chères, les 20 % les plus chères étant placées dans le portefeuille 1, les 20 % suivants étant placés dans le portefeuille 2, et ainsi de suite jusqu’au portefeuille 5 qui contient les 20 % les moins chers de l’univers investissable. 

 

La courbe noire du graphique ci-dessous compare la performance historique de l’achat du portefeuille d’actions bon marché et de la vente à découvert du portefeuille d’actions chères, ce qui se traduit par une performance du portefeuille neutre par rapport au facteur « value ». La courbe bleue suit la même approche mais classe les actions en utilisant notre score de qualité interne et représente la performance du facteur « quality ».

 

 

L’ampleur de la pandémie du Covid étant devenue évidente pour les marchés financiers au début de 2020, la situation des facteurs de valeur et de qualité a considérablement divergé. Les actions bon marché ont été à la peine par rapport à celles plus chères, d’où une performance médiocre pour un portefeuille « value ». En revanche, les valeurs de grande qualité se sont bien comportées durant cette période, tandis que leurs homologues de faible qualité ont été à la peine, d’où un profil de rendement attractif pour un portefeuille de « qualité ».

 

À l’annonce des nouvelles positives concernant les vaccins, l’inverse s’est vérifié.  Les valeurs chères et de grande qualité ont souffert et les valeurs bon marché de moindre qualité se sont bien comportées. Durant l’été 2021, l’annonce de nouveaux variants a tempéré les gains du facteur « value » et l’actualité positive (négative) de Covid a été favorable (préjudiciable) à la valeur par rapport à la qualité.

 

C’est une illustration très claire des performances différentes de facteurs selon les environnements de marché. Il explique également pourquoi nous opérons une rotation entre le style value et la qualité au sein de notre critère de sélection de titres dynamique : Nous le faisons parce que chacune des deux sous-composantes tend à bien se comporter à un moment différent.

Systematic approach to value investing chart one

Source : Jupiter, au 31.12.21. Fourchette de dates Sept. 2019-Déc. 2021.

La rotation entre les facteurs exige la capacité d’identifier efficacement les périodes durant lesquelles un facteur se comportera bien ou mal.  Le graphique ci-dessous illustre notre évaluation interne de l’appétit pour le risque, que nous utilisons pour effectuer une rotation entre les sous-composantes « value » et « quality ». Nous évaluons ici la volonté des investisseurs d’arbitrer une unité de valeur risquée contre une unité de flux de trésorerie future plus chère mais plus certaine.

 

L’impact du Covid devenant manifeste, l’appétit pour le risque a fortement diminué, passant d’environ 50 % à moins de 20 %, selon notre mesure. Nous avons observé que l’appétit pour le risque est resté faible pendant une grande partie de l’année 2020, jusqu’à ce que les nouvelles positives concernant les vaccins aient entraîné une nette amélioration de la volonté des investisseurs à prendre du risque. L’appétit pour le risque est resté élevé au premier semestre 2021 jusqu’à ce que l’annonce de nouveaux variants Covid tempère les attentes, plaçant l’environnement dans une position plus équilibrée.

Systematic approach to value investing chart two

Source : Jupiter, au 31.12.21. Fourchette de dates Sept. 2019-Déc. 2021.

Comprendre les facteurs de valeur

Même si nous alternons entre valeur et qualité, il est plus fréquent d’opposer les termes value et croissance. Afin de comprendre pourquoi nous pensons que la valeur et la qualité sont plus intéressantes que la value et la croissance, nous devons comprendre pourquoi investir dans la value offre des rendements attrayants. Il existe deux théories prédominantes pour expliquer cela.


La première est une explication comportementale, faisant valoir que les actions bon marché sont excessivement délaissées par le marché. Les investisseurs ancrent leurs anticipations sur les résultats passés et extrapolent excessivement les mauvaises performances pour l’avenir. Les attentes des investisseurs à l’égard des actions bon marché sont systématiquement trop faibles, par rapport à l’ensemble des résultats possibles que les entreprises bon marché pourraient obtenir.

 

Le deuxième argument en faveur de la forte performance à long terme de l’investissement « value » plaide en faveur du fait que les actions bon marché sont plus risquées que leurs homologues plus chères. Cette vision de la value fait valoir que les rendements supplémentaires issus de l’achat d’actions bon marché constituent une compensation pour prendre des risques supplémentaires.

 

Contrairement aux arguments souvent polarisés que l’on retrouve dans les milieux universitaires, nous trouvons un soutien empirique pour ces deux points de vue. Selon nous, certaines des performances des stratégies « value » sont dues à des biais comportementaux, tandis que d’autres sont liées à un risque supplémentaire. Nous sommes convaincus que la compréhension des facteurs de rendement nous aide à concevoir de meilleures stratégies de valorisation.

 

Pour faire la démonstration des deux écoles de pensée, nous avons divisé l’univers investissable en cinq portefeuilles basés en se basant naïvement sur le ratio cours/valeur comptable. Les actions sont ordonnées entre les valeurs les plus chères et les moins chères, les 20 % les plus chères étant placées dans le portefeuille 1, les 20 % suivants dans le portefeuille 2, et ainsi de suite jusqu’au portefeuille 5 qui contient les 20 % les moins chers de l’univers d’investissement.

 

Le graphique ci-dessous illustre la croissance historique moyenne des bénéfices de chacun de ces cinq portefeuilles. Les actions bon marché ont généralement enregistré une faible croissance historique de leurs bénéfices alors que les actions chères ont enregistré une croissance historique particulièrement soutenue.

 Toutefois, le deuxième graphique montre également que les valeurs bon marché surperforment généralement les prévisions de croissance future de leurs bénéfices alors que c’est l’inverse pour les valeurs plus chères. Si l’on tient compte de ces observations, on peut dire que les actions bon marché ont tendance à avoir une croissance réelle plus faible que les actions chères, mais qu’elles ont aussi plus de surprises positives en termes de croissance que les actions chères.

 

Cela suggère que pour capturer la composante comportementale mal valorisée de la valeur, nous devons intégrer les perspectives de croissance future de l’entreprise. Notre critère de sélection des valeurs de croissance durable intègre des mesures de valorisation afin d’identifier les anomalies de valorisation sur le marché. La value et la croissance ne sont pas des substituts. On ne peut évaluer l’un sans envisager l’autre.

Book Yield Exposure to Historic EPS Growth

Systematic approach to value investing chart three

Source : Jupiter, au 31.12.21. Période Déc. 1994 Déc. 2021.

Book Yield Exposure to EPS Growth Beats

Systematic approach to value investing chart three

Source : Jupiter, au 31.12.21. Période Déc. 1994 Déc. 2021.

Le graphique ci-dessous utilise les mêmes cinq portefeuilles que le graphique précédent, mais examine plutôt l’endettement moyen des entreprises (c’est-à-dire la taille de la dette d’une entreprise par rapport à son bilan) au sein de chaque portefeuille de rendement comptable. « Rendement comptable » signifie ici les capitaux propres inscrits au bilan, par action, divisés par le cours de l’action. Les entreprises bon marché ont un rendement comptable élevé. Nous trouvons des éléments étayant l’affirmation selon laquelle les actions bon marché sont plus risquées que les actions chères. Le portefeuille bon marché est sensiblement plus endetté que le portefeuille cher.

Book Yield Exposure to Leverage

Systematic approach to value investing chart five

Source : Jupiter, au 31.12.21. Période Déc. 1994 Déc. 2021.

Comprendre quels sont les moteurs de performance que nous essayons de capter est crucial pour concevoir des stratégies « value » performantes.

Identifier des valeurs bon marché

Les travaux précédents utilisent le ratio cours/valeur comptable comme une mesure naïve de l’évaluation. Le graphique ci-dessous suit la performance neutre au marché de quatre différentes mesures de valorisation. Il montre à quel point les différentes mesures de valorisation ont eu des performances très différentes. La façon dont nous évaluons la valeur fondamentale au niveau des valeurs est donc très importante. 

 

Évaluer une société sur la base de ses ventes ou de ses revenus (la courbe bleue) a historiquement généré des rendements élevés ; toutefois, cela a également été accompagné de niveaux élevés de volatilité. Il y a des périodes dans l’histoire, comme en 2008, où la performance était nettement plus faible que les mesures alternatives d’évaluation de la valeur ne le prévoyaient. L’évaluation d’une entreprise sur la base de son bilan comptable, ou de ses capitaux propres, est une méthode assez différente. Le rendement comptable, représenté par la courbe grise dans le graphique ci-dessous, a historiquement enregistré des performances inférieures à celles du rendement des ventes, mais avec une volatilité moindre et des baisses plus faibles. 

 

Évaluer la valeur fondamentale en se basant sur les ventes (revenu généré sur une période relativement courte) et en utilisant la valeur comptable (vue comptable sur l’actif net d’une société), représente les extrêmes opposés des données financières. Selon nous, ces deux mesures offrent une vision floue de l’entreprise et ne permettent que partiellement d’exploiter les performances comportementales disponibles à partir d’une évaluation plus complète de la valeur fondamentale.

Systematic approach to value investing chart

Source : Jupiter, au 31.12.21. Période Déc. 1994 Déc. 2021.

Au lieu de cela, nous considérons simultanément plusieurs facteurs fondamentaux, dont la gestion des coûts, l’efficacité opérationnelle et les anticipations de croissance, et nous les combinons pour évaluer de manière globale la juste valeur d’un actif.

Rechercher de la valeur dans la pratique

La composante « value » de notre critère interne de sélection de titres de valorisation dynamique est beaucoup plus sophistiquée qu’un simple facteur de rendement comptable. Le graphique ci-dessous le montre. Chaque point sur le graphique en nuage de points représente une société de notre univers d’investissement à un moment donné. L’axe des abscisses mesure le rendement comptable de l’entreprise tandis que l’axe des ordonnées représente la composante « value » de notre critère de sélection de valorisation dynamique.

 

L’essentiel est qu’il y a très peu de relation entre les deux mesures. Les entreprises bon marché en termes de rendement comptable (les plus à droite sur l’axe des abscisses) ne sont pas nécessairement bon marché selon notre évaluation interne de la valeur.

 

La composante « value » de notre critère de valorisation dynamique par rapport au rendement comptable

The value component of our dynamic valuation criterion versus book yield

Source : Jupiter, au 31.12.21.

Sociétés en bleu. Le graphique ci-dessus montre des poches de convergence qui sont colorées en bleu le long de la diagonale principale. Les sociétés présentées en bleu ont un profil de valeur similaire, à la fois en utilisant le rendement comptable et en utilisant notre méthodologie interne.

 

Toutefois, à mesure que nous nous éloignons de la diagonale principale du graphique, les points passent du bleu au vert puis au rouge, ce qui indique des différences significatives entre l’analyse naïve du rendement comptable des titres « value » et notre propre approche.

 

Les points rouges au coin inférieur droit sont les entreprises bon marché sur la base du rendement comptable, mais chères lorsque nous utilisons notre processus de valorisation interne. A l’inverse, les points rouges de la partie supérieure gauche soulignent les valeurs que notre approche estime bon marché, mais qu’une approche naïve du rendement comptable jugerait chères. Au-delà des techniques de valorisation naïves, nous détenons un ensemble d’actions sensiblement différent.

Gérer le risque de valeur

Amplifier les biais comportementaux n’est qu’un moyen d’améliorer les rendements des investissements de style value. Comme nous l’avons évoqué, une partie des rendements démesurés offerts par les investissements « value » est due au fait que les actions bon marché sont intrinsèquement risquées. Gérer ce risque est un autre moyen de générer de l’alpha.

 

Ce graphique ci-dessous présente à nouveau des points correspondant aux entreprises à un moment donné. Toutefois, nous définissons désormais la composante « value » de notre critère de sélection de valeurs par rapport à la composante « qualité » de ce critère.

 

Les points verts représentent des entreprises à la fois bon marché et de grande qualité et sont donc particulièrement intéressantes à acheter. Les rouges représentent des entreprises à la fois chères et de faible qualité, particulièrement peu attractives à acheter, ou attractives pour la vente à découvert (selon le mandat du fonds – nous gérons à la fois des fonds « long short » et « long-only »).

 

Toutefois, de nombreuses valeurs sont raisonnablement valorisées selon ces deux dimensions. Les sociétés bleues sont soit bon marché mais de faible qualité, soit chères mais de grande qualité. Cela montre que ces 2 facteurs ont tendance à être corrélés négativement.

 

Suite à notre évaluation de l’appétit pour le risque, nous gérons le risque « value » en privilégiant la qualité en période de peur et en privilégiant la valeur en période de recherche de rendement élevé. Contrairement à la value et à la croissance, la valeur et la qualité sont des substituts. Ils se comportent bien à des moments opposés et de nombreuses valeurs peuvent être classées comme bon marché et de faible qualité, ou chères et de haute qualité.

 

Les composantes « value » et « quality » de notre critère de valorisation dynamique

The value versus the quality components of our dynamic valuation criterion

Source : Jupiter, au 31.12.21.

Un modèle dynamique

Enfin, le résultat final est un modèle dynamique, fondé sur la compréhension que pour collecter l’alpha disponible en raison d’anomalies de valorisation lié à des biais comportementaux, il faut également être exposé à un certain risque. Nous gérons notre exposition à ce risque en évoluant de façon dynamique vers la qualité en fonction de notre évaluation de l’appétit au risque.

 

La performance simulée à long terme des deux composantes de notre critère de sélection de valorisation dynamique (valeur et qualité) est présentée dans le graphique ci-dessous en noir et bleu respectivement.

 

Ils affichent tous deux des performances positives sur un horizon à long terme mais se comportent bien sur différentes périodes. 

La troisième courbe, intègre une rotation dynamique entre les deux composantes, démontrant à la fois des rendements améliorés et une réduction du risque.

 

Systematic approach to value investing chart five

Source : Jupiter, au 31.12.21. Période Déc. 1994 Déc. 2021.

Les performances passées sont simulées et ne préjugent pas des performances futures. Les données présentées représentent les rendements totaux des portefeuilles fictifs. Le graphique est présenté uniquement à titre d’illustration. Il ne représente pas la performance réelle d’un quelconque fonds ou stratégie Jupiter et ne préjuge pas des résultats futurs.

 

En résumé, l’investissement « value » systématique est un style d’investissement riche qui offre des rendements attrayants et une relation complexe avec le risque. Nous cherchons à comprendre les sources de performance de nos stratégies d’investissement afin d’identifier dans quelles conditions de marché elles peuvent être utilisées pour générer de l’alpha. Nos études empiriques nous ont conduit à une approche dynamique du facteur « value », en la combinant au facteur qualité, pour des performances ajustées du risque supérieures. Notre critère de sélection de titres dynamique n’est qu’un des cinq critères de sélection de valeurs que nous utilisons dans notre processus d’investissement, ce qui nous permet de proposer des portefeuilles dynamiques et diversifiés.

The value of active minds – la pensée indépendante :

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