Chers investisseurs,
Lorsque j’ai écrit l’année dernière que nous positionnions la stratégie Jupiter Dynamic Bond pour résister aux chocs imprévus et préserver le capital des investisseurs à un moment où les marchés faisaient la fête comme en 1999, les mauvaises données macroéconomiques et le risque politique, plutôt qu’une pandémie mondiale, étaient mes plus grandes préoccupations. Le monde et notre vie quotidienne ont changé de façon inimaginable depuis lors et je voudrais vous remercier pour votre confiance et votre patience.

Heureusement, la stratégie est entrée dans la crise en mars dernier dans une position défensive qui nous a permis de surmonter la volatilité et de profiter d’opportunités attractives sur le marché du crédit, juste avant que les banques centrales n’interviennent pour soutenir les marchés. Le positionnement équilibré de la stratégie – consistant à détenir d’une côté des obligations d’État américaines et australiennes sur un horizon moyen et long terme comme couverture contre le risque à court terme et la déflation à long terme, et de l’autre, du crédit corporate au travers d’entreprises résilientes – a été le moteur clé de la performance. Je suis heureux de dire que cela a permis au fonds d’enregistrer de solides performances au cours d’une année très imprévisible.

Si l’on examine les marchés financiers un an plus tard, il semble que plus les choses changent, quoi que. Les marchés sont retournés à la fête et les espoirs de reflation abondent. Derrière cet optimisme se cachent les attentes des « esprits animaux » et la demande refoulée des consommateurs une fois que les vaccins auront permis la réouverture des économies, les programmes de dépenses du président Biden nouvellement élu et la politique de soutien continu des banques centrales.

Les perspectives semblent en effet positives pour le marché du crédit corporate : les banques centrales ont montré leur jeu en mars dernier en soutenant le marché du crédit. Mais la pandémie laissera également derrière elle un monde très différent. S’il y a une leçon à tirer de l’année dernière, c’est qu’il faut être attentif aux risques inattendus. Ces risques ne sont pas prévisibles et, comme à la même époque l’année dernière, les marchés des actifs risqués sont potentiellement vulnérables à tout événement inattendu. Je pense qu’une approche flexible qui alloue du crédit soigneusement sélectionné, parallèlement à une allocation importante aux obligations d’État des marchés développés, sera une manière prudente d’équilibrer le risque et le rendement en 2021.
La déflation est le « prix de demain »
En substance, le consencus s’accorde à dire qu’il faut être short du dollar américain, short des bons du Trésor américain et long des matières premières, en prévision d’un boom économique post-pandémique et d’une résurgence des forces inflationnistes. Nous adoptons une position opposée. Nous restons fermement convaincus que les pressions déflationnistes sont toujours les forces dominantes plutôt que les forces inflationnistes. Nous prévoyons que les rendements des obligations d’État resteront à ces faibles niveaux et peut-être même diminueront, que la force du dollar américain se stabilisera et que les matières premières resteront volatiles.

Il y aura sans aucun doute un pic de croissance et d’inflation lorsque les économies rouvriront en raison de faibles effets de base, mais nous pensons que cela s’estompera au bout d’un ou deux trimestres au plus et ne sera certainement pas le début d’une nouvelle tendance inflationniste. Même la Chine, qui a connu un fort rebond de sa croissance économique depuis qu’elle est entrée dans sa phase de reprise après la crise de Covid-19, n’a pas connu de reprise de l’inflation qui y soit associée.

En effet, l’inflation est partout contrôlée par les facteurs structurels combinés que sont l’endettement excessif, le vieillissement de la population et les disruptions dues à la mondialisation, à la technologie et à la main-d’œuvre bon marché. Outre la démographie, la Covid-19 a accéléré toutes ces tendances. La capacité excédentaire du marché du travail et les attentes du public en matière de hausse des prix laissent actuellement entrevoir une faible inflation prolongée. La tendance de 40 ans de faible croissance des salaires dans les économies développées signifie que le travail a aujourd’hui un faible pouvoir de fixation des prix par rapport au capital. Le pouvoir accru des monopoles mondiaux, conjugué aux niveaux de chômage élevés provoqués par le Covid-19, est une dynamique qui continuera à faire pression sur les salaires pendant un certain temps encore.

Nous sommes également au début d’une révolution technologique qui est intrinsèquement déflationniste. Nous en avons eu un avant-goût durant la pandémie, les entreprises ayant trouvé des moyens encore plus efficaces de fonctionner, ce qui exerce une pression à la baisse sur les salaires et l’emploi ; et nous nous sommes tous tournés vers des services et des applications en ligne rentables pour toute une série de raisons, du divertissement à la santé en passant par l’alimentation et les biens essentiels. Les disruptions dues à l’intelligence artificielle, à la robotique et à l’automatisation ne feront qu’accentuer la faible croissance des salaires. Cette force est si puissante que dans son livre The Price of Tomorrow, le technologue Jeff Booth se demande si elle conduira effectivement à la fin de « l’ère de l’inflation ».

La déflation à long terme est encore exacerbée par le vieillissement démographique des économies développées. Le graphique ci-dessous met en évidence la corrélation significative entre l’âge médian d’une population et les rendements des obligations d’État à long terme.
La démographie, c’est le destin
Les plus grandes économies du monde : rendement sur 30 ans par rapport à l’âge median
Demographics is destiny
Source : Bloomberg. Données au 3 septembre 2020
La dette, les démocrates et la loi des rendements décroissants
Au dernier décompte, la dette mondiale s’élevait à 280 000 milliards de dollars et ne cessait d’augmenter. Avec une telle niveau de dette – et en grande partie improductive – toute hausse des rendements des obligations d’État entraînera une volatilité des actifs risqués et une nouvelle baisse des rendements. La hausse des rendements obligataires n’est pas propice à ce que la Réserve fédérale atteigne ses objectifs à long terme en matière d’inflation. Comme l’a récemment fait remarquer la banque d’investissement HSBC, une hausse de 1 % des taux aujourd’hui équivaut à une hausse de 3 à 4 % des taux il y a 20 ans.

Mais la croissance est extrêmement difficile à générer dans un monde fortement endetté. Selon le principe économique, lorsqu’on surutilise l’un des facteurs de production (terre, travail ou capital), la loi des rendements décroissants finit par s’appliquer. Et dans ce cas, nous avons surutilisé le capital de la dette. La puissance de la politique fiscale s’estompe en conséquence : dans les années 50, 1 dollar de dette générait environ 0,80 dollar de PIB ; aujourd’hui, c’est moins de 0,40 dollar. C’est l’une des nombreuses raisons pour lesquelles je suis sceptique quant au fait que les gros paquets de dépenses des démocrates aux États-Unis puissent générer de l’inflation.

Sur le plan politique, le Congrès est toujours très divisé malgré l’enthousiasme suscité par la victoire de la vague bleue du président Biden et des démocrates. La majorité démocrate est si étroite que la vice-présidente Harris a la voix déterminante et que beaucoup de nouveaux démocrates sont modérés. Cela pourrait rendre l’adoption de grands programmes de dépenses plus difficile que ne le pensent les partisans de la relance. En outre, dans un pays aussi bureaucratique et dirigé par des lobbyistes que les États-Unis, la mise en œuvre de tout plan d’infrastructure prendra probablement des années avant que l’économie n’en retire des bénéfices en termes de croissance et d’inflation.
De nombreuses possibilités, mais l’analyse du crédit est essentielle
Compte tenu de la politique de soutien de la banque centrale, les obligations de qualité investment grade et à haut rendement sont un bon choix, mais une analyse approfondie du crédit est essentielle. De nombreux modèles d’entreprise semblent vulnérables à des perspectives de croissance plus difficiles, en particulier dans les secteurs cycliques et ceux qui sont fortement endettés. Les taux de défaillance ont augmenté aux États-Unis et la tendance ne fait que s’accentuer.

Nous envisageons d’allouer dans le fonds plus de 40 % à des entreprises à haut rendement, principalement défensives, qui, selon nous, peuvent traverser une période prolongée de volatilité économique. Ces entreprises « au travers du cycle » comprennent certaines entreprises de restauration rapide et de livraison de nourriture, des supermarchés, des pharmacies et des services de diffusion télévisée, qui ont tous connu un essor considérable pendant la pandémie. Beaucoup de ces entreprises sont notées BB, ce qui nous permet d’obtenir des rendements allant de 3 % à deux chiffres, à partir de noms qui offrent la possibilité d’obtenir le coupon plus le remboursement du capital.

Nous avons également constitué une allocation de 5 % aux obligations du secteur du pétrole et du gaz, où nous avons trouvé des poches de valeur chez les producteurs américains et européens, à travers des titres à haut rendement et de qualité investissement grade. La production pétrolière devrait diminuer cette année, ce qui devrait faire monter les prix du pétrole.

En ce qui concerne les obligations d’État, dans un monde où il existe 17 000 milliards de dollars d’obligations à rendement négatif, le vieux dicton « au pays des aveugles, le borgne est roi » me vient à l’esprit. Nous avons récemment ajouté des obligations d’État chinoises à 10 ans – avec des rendements de 3,15 % contre 1,1 % pour les bons du Trésor américain – ce qui représentait une opportunité intéressante. Comme je l’ai déjà mentionné, l’économie chinoise connaît une forte croissance sans aucun signe d’inflation, alors que la main-d’œuvre est en diminution, que la croissance démographique stagne, que la croissance de la productivité est au point mort et qu’il existe une bulle de crédit – semblable à celle du monde développé – ce qui signifie que la croissance économique du pays aura tendance à diminuer. Tout cela s’ajoute à des rendements réels positifs en Chine qui semblent quelque peu attrayants.

Les récessions ont tendance à être courtes et violentes, et les reprises longues et progressives. Il y aura sans doute d’autres surprises cette année, et notre stratégie reste suffisamment souple pour évoluer en fonction des faits. Je suis convaincu que notre capacité à investir sur l’ensemble des marchés obligataires mondiaux nous donne la liberté et la souplesse nécessaires pour gérer le risque tout en recherchant des rendements positifs, et cela reste un privilège d’investir en votre nom.

Ariel Bezalel

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